Depuis le 1er janvier 2014, un temps partiel (sauf dérogation) ne peut être inférieur à 24 heures/semaine pour les nouveaux contrats. Pour les salariés déjà en poste à temps partiel, la date butoir pour se conformer à la législation était le premier janvier 2016.
Cette réforme devait limiter les emplois précaires subis par les salariés à temps partiel.
Voici des exemples de ce qui m’ont été rapportés. Le résultat des courses en histoire :
Cas n°1 : L’employeur en profession libérale et ses trois employées
Ce médecin spécialiste employait 2 secrétaires à temps partiel (respectivement 15h et 17h) et une femme de ménage 5 heures par semaine avant la réforme.
Ses deux secrétaires qu’il emploie depuis 25 ans avant choisi le nombre d’heures qu’elles souhaitaient faire pour pouvoir jouir du temps qu’elles souhaitaient pour leur foyer, leurs enfants, leur vie sociale et loisirs. Après maintes discussions, ni l’une ni l’autre n’a voulu étendre son nombre d’heures de travail. Depuis toutes ces années à travailler ensemble, elles avaient trouvé leur mode de fonctionnement idéal et flexible pour le bénéfice de chacun. Le médecin spécialiste a dû les licencier. Pole emploi leur ayant conseillé de faire une formation et le temps restant au chômage jusqu’à leur retraite.
La question de la femme de ménage ne se pose pas. Qui emploierait une femme de ménage 24h par semaine pour nettoyer un cabinet médical ?
Aujourd’hui, en janvier 2016, il est seul et sa femme l’aide à faire le ménage du cabinet le dimanche. Les deux secrétaires et la femme de ménage sont au chômage.
Nombre de création d’emploi : 0
Nombre de nouveaux chômeurs : 3
Le médecin en est malade, il a pris 10 Kg et a son moral dans les chaussettes.
Le chômage est-il moins précaire qu’un CDI vieux de 25 ans ? Rien n’est moins sûr !
Cas n°2 : Le salon de coiffure
Le petit salon de coiffure employait 3 employées à temps partiel et une apprentie. Cela permet d’avoir un roulement intéressant pour satisfaire les clients, les employées et la patronne.
La patronne se retrouve depuis avec son apprentie et une des employées qui a pu avoir une dérogation pour congés parental partiel !
Nombre d’emplois créés : 0
Nombre de personnes au chômage : 2
Une patronne au bord de la crise et des clientes mécontentes car il faut désormais prendre rendez-vous pour espérer s’asseoir devant une coiffeuse ! Quand on voit le nombre de salons de coiffure qui ferment, cela ne laisse rien présager de bon !
Cas n°3 : Une TPE qui aimerait devenir une PME
C’est l’histoire d’une entreprise familiale qui après une dizaine d’années à osciller entre 2 et 4 employés aimerait passer à la vitesse supérieure et passer un échelon critique de développement. Pour cela, il est nécessaire que l’entrepreneur structure la partie commerciale, la partie administrative et renforce son équipe technique. Au bas mot, cela sous-entend embaucher 4 personnes en misant sur l’avenir. Un avenir peu prometteur par les temps qui courent.
Nous sommes en 2013, pour que le pari du développement de l’entreprise ne la précipite pas dans la tombe, la stratégie est essentielle et chaque coût doit être calculé. L’entreprise mise sur l’arrivée d’une assistante administrative à mi-temps (17,5 h/semaine), 2 techniciens et 1 commercial à plein temps.
Le recrutement du commercial n’a pas abouti, aucun ne souhaitant accepter la proposition de salaire smic + commissions + primes qui aurait permis à l’entreprise d’accompagner sa croissance en limitant les risques.
Le patron avait donc revu son plan
en prenant lui-même en charge l’intégralité du commercial. L’équilibre du projet était précaire. Pas beaucoup plus de temps pour faire rentrer de nouvelles affaires. En effet, le temps nécessaire pour former la secrétaire/assistante aux parties technique, pratique, fonctionnelle implique que le patron assurant cette partie seul depuis des années soit disponible pour cela. La quantité de temps dégagé pour engranger de nouvelles affaires semble bien limitée pour avoir la capacité de pérenniser l’embauche de 2 personnes et demie en plus.
Cela voudrait dire pouvoir assumer de sortir ces 3 nouveaux salaires + charges pendant deux à trois mois sans augmenter le volume d’affaires signées ! Un pari bien risqué.
La réforme des 24 heures a sonné le glas de ce projet amenant le dirigeant à s’enfoncer un peu plus dans son burn-out sans possibilité d’en sortir.
Emplois créés : 0
Emplois planifié non créés : 2,5
Quelques réflexions en conséquence :
Ces trois exemples parmi de nombreux autres qui m’ont été rapportés, m’amènent à réfléchir à quelques questions :
- Vaut-il mieux un emploi « précaire » choisi en état de cause, bénéfique à toutes les parties, ou un chômage assuré pour 2 ans ? Que se passe-t-il après le chômage ? La situation ne sera-t-elle pas encore plus précaire ?
- Ces mesures ont-elles vraiment eu pour objectif de créer de l’emploi ? Ou répondaient-elles juste à la problématique : rien de ce qu’on a essayé n’a fonctionné, pourquoi ne pas essayer quelque chose d’improbable parce qu’on est pas à l’abri d’un coup de bol ?
- Pourquoi les gouvernants ne concertent-ils pas les personnes concernées avant de mettre en place des réformes inadaptées ?
- En quoi les gouvernants ont-ils le droit d’anéantir la liberté d’une personne à travailler ne serait-ce que quelques heures par semaine si c’est son choix ? Le gouvernement ne dépasse-t-il pas sa marge de liberté ? La liberté des uns s’arrêtent où commencent celles des autres. La liberté n’est-elle par une des valeurs de base de la France ? Pourquoi la bafoue de la sorte ? Cette mesure me semble anti-constitutionnelle, qu’en pensez-vous ?
- Existe-t-il réellement des salariés heureux de cette réforme ? Personnellement, malgré le nombre de personnes que je côtoie, je n’en connais aucun!
La logique des chiffres dans la réforme du temps partiel
Pour finir, j’aimerais revenir sur des chiffres.
Selon moi, mais je peux me tromper, personne n’est infaillible ! Chez moi la moitié de 35h (la durée légale du travail en France, à ce jour) c’est 35h/2= 17,5h.
Dans l’hypothèse où cette réforme serait une manoeuvre déguisée pour tendre à nouveau vers les 39h, j’ai aussi calculé le résultat de cette hypo39/2=19,5h
Alors d’où sortent ces 24h ????
Une réforme mal comprise et des patrons mal-informés
Contrairement à ce qui est annoncé sur la page dédiée à la question sur service-public.fr
Les demandes de dérogations écrites pour convenances des salariés ne sont pas validées dans la plupart des cas. Des accords de branches contraires ayant été validés, eux.
La responsabilité des syndicats dans la réforme du temps partiel
D’après les feedback que j’ai collecté, il semblerait que la demande et la pression soit issue des syndicats. Ce matin même, j’étais témoin d’une discussion sur le rôle des syndicats et des représentants de branche professionnelles. La discussion a émergé alors que rien ne l’aurait présagé dans une salle d’attente où personne ne se connaissait. Le sujet abordé était celui-ci.
Par curiosité, je me suis contentée d’écouter.
Les participants travaillaient dans le public et le privé. Il y avait des femmes et un homme. L’ensemble s’accordait à dire qu’ils ne se reconnaissaient pas dans les propos de leurs représentants, porte-paroles et syndicats. Ceux-ci ne rapportaient pas leurs choix, envies, demandes. Il semblerait même que ces personnes étaient totalement ignorantes de la réalité de terrain et de la vie quotidienne de personnes qu’elles semblaient représenter. Les syndicats restent-ils dans leur rôle ou le transgressent-ils dans un jeu de pouvoir toxique ?
La question se pose donc clairement sur l’adéquation du système d’élection de ces personnes et la validité des propos dont ils sont censés être les rapporteurs et défendeurs. Il semble qu’une lacune de contrôle soit clairement établie. Selon moi, la mise en place d’un référendum par consultation électronique devrait être rendu obligatoire pour ce type de réforme qui impacte de façon majeure (je dirais même gravement) la vie des gens et le développement des entreprises.
Je vous laisse vous faire votre propre opinion…
Bientôt, je vous parlerai des NAP, cette réforme absurde qui m’écoeure. Puis certainement du RSE, une réforme absurde qui pèsent sur les entreprises et mettent des emplois en péril.
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2 commentaires sur “La réforme du temps partiel, une réforme qui tue l’emploi”
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Je suis dans le cas du mi temps 24H même si j’aurais souhaité plus. Contrat public oblige
Le problème concerne principalement les contrats publics destinés aux AVS, Auxiliaires de vie et autres animateurs de vie scolaire et périscolaire. Du coup, pour régler un problème lié au secteur public, des emplois sont détruits dans le secteur privé. On se demande où est la logique !
Ce qui m’interpelle c’est si le salarié est satisfait de la durée de son contrat, pourquoi l’en priver ?!?